L' Histoire en chansons
Cadet Rousselle
Parisenchansons
Auteur : GASPARD DE CHENU Année : 1792

 

CADET ROUSSELLE

Analyse

C'est sur un air de contredanse datant des années 1780, probablement rapporté du Brabant,qu'on a conçu cette parodie d'une chanson du XVè siècle relative à Jean de Nivelle.

On sait que Jean II de Nivelle, furieux de la lâcheté de ses fils, les avait déshérités et ne parlait plus d'eux qu'en les traitant de chiens...

Au début du XVIè siècle, la "Farce des deux savetiers" citait quelques couplets burlesques relatifs à "chien de Jean de Nivelle", que les Comédiens Français avaient encore à leur répertoire, vers 1600.

Cette chanson se moquant gentiment de l'huissier audiencier de la ville d'Auxerre Guillaume Joseph Rousselle, dit Cadet Rousselle, est écrite en 1792, sur l’air de Jean de Nivelle, par Gaspard de Chenu, notable et auteur de chansons spirituelles et satiriques.

La chanson ne semblait pas devoir dépasser les limites de la localité, mais les volontaires auxerrois l’ayant emportée avec eux à l’armée, les soldats l’adoptent avec enthousiasme et elle devient le chant de l’armée du Nord.

Elle se répand par la suite dans toutes les classes de la société française où sa popularité éclipse progressivement son modèle Jean de Nivelle.

En 1793, le chevalier Joseph Aude en proposait une nouvelle version dans son vaudeville "Cadet Rousselle barbier", avec une allusion parfaitement évidente à l'original.

 

CadetRousselle1

 

Mais en était-il l'auteur ?

Elle était déjà connue aux premières heures de la Révolution. Danton la chantait, dit-on, pour se moquer de Robespierre.

 

N'est-il pas plus logique, dans ces conditions, d'en attribuer la paternité au héros lui-même de cette innocente aventure, destiné à s'inscrire dans la légende aux côtés du Roi Dagobert et du Maréchal de La Palisse?

C'est en effet un touchant personnage, que ce Douaisien, dont le portrait se trouve encore au musée de sa ville natale. On l'imagine pourtant tout droit sorti d'un conte d'Eichendorff ou de Rilke.

Benjamin d'une nombreuse famille, d'où son sobriquet, il avait acquis une renommée locale par son habileté à découper le papier et à créer spontanément des visages.
On le rencontrait sous le porche des églises et même en plein air, et, en quelques coups de ciseaux, il réalisait la tête d'un saint ou d'un apôtre, qu'il vendait ensuite.

L'évolution des goûts et le culte des décors champêtres le conduisirent, plus tard, à découper des fleurs, des animaux ou des scènes pastorales, avec la même ingénuité et le même sens du merveilleux.

Est-il le naïf auteur de quelques couplets le prenant lui-même pour prétexte et dont d'innombrables improvisateurs allaient allonger la liste jusqu'à nos jours?

Leur tâche était d'autant plus facile que le chiffre 3 a, de tous temps, été favorable à la chanson, qu'il s'agisse de garçons revenant du Piémont, de jeunes tambours, de capitaines ou d'orfèvres...

On sait que l'air était encore à la mode sous l'Empire, et qu'il servit même de chant de ralliement pour les royalistes de Provence, au moment de la Terreur blanche.

 

Cadetrousselle3

 

Air "sanglant", qui faisait, paraît-il, les patriotes traqués, il subissait un sort comparable à celui du "Carillon national", que chantait Marie-Antoinette, avant de devenir le "Ca ira" des sans-culottes.

Les droits sont possédés par leurs auteurs respectifs.