Parisenchansons
Auteur : MARC-ANTOINE DESAUGIERS
Musique: GARDEL Aîné
Année : 1802

 

TABLEAU DE PARIS A 5H DU MATIN

Analyse

Le poète Marc-Antoine Désaugiers écrivit cette chanson en 1802. Sur un air de contredanse, "le Ballet de la rosière" de Gardel aîné, Désaugiers nous a offert ce
petit chef d'oeuvre de gaité, de rythme et de légèreté.

Il souhaitait décrire de manière réaliste le petit peuple de Paris, celui des marchands, des forts des Halles, des petits artisans, dont le travail commençait dès cinq heures du matin.

MarcAntoineDesaugiers

Les métiers manuels sont à l'honneur, puisque l'ouvrier travaille, tandis que l'écrivain "rimaille", le fainéant baille et...le savant lit.

Mais à y regarder de plus près, ce sont les moeurs de toute une époque. En 1802, nous avons quitté la tourmente révolutionnaire, puis le régime corrompu du Directoire.

Le Consulat, qui mènera à l'Empire, est une ère de prospérité retrouvée et de plus grande stabilité politique.

Mais les moeurs n'ont pas vraiment changé. En effet, la bonne quitte le lit de son maître en maudissant le gêneur qui sonne à la porte.

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C'est l'histoire de tout un peuple qui est décrite ici. Son labeur, ses peines, ses joies, ses amours, ses travers...

Reprise "Au lapin agile", dès le début du 20è siècle, cette chanson fera le bonheur de ses habitués: Picasso, Roland Dorgelès, Paul Fort, Pierre Mac Orlan, Guillaume Apollinaire, Max Jacob, André Salmon...

Il est probable que son thème a inspiré Jacques Lanzmann et Jacques Dutronc, lorsqu'en une nuit de 1968, ils écrivirent: "Il est cinq heures, Paris s'éveille".

Paroles

Poème de Marc-Antoine Désaugiers (1802)
interprétation : Renée Jean (cabaret de Montmartre, le lapin Agile)

L'ombre s'évapore,
Et déjà l'aurore
De ses rayons dore
Les toits d'alentour.
Les lampes pâlissent,
Les maisons blanchissent,
Les marchés s'emplissent :
On a vu le jour.

De la Villette,
Dans sa charrette,
Suzon brouette
Ses fleurs sur le quai.
Et de Vincennes,
Gros-Pierre amène
Ses fruits que traîne
Un âne efflanqué.

Déjà l'épicière,
Déjà la fruitière,
Déjà l'écaillère,
Sautent à bas du lit.
L'ouvrier travaille,
L'écrivain rimaille,
Le fainéant bâille
Et le savant lit.

J'entends Javotte,
Portant sa hotte,
Crier : « Carottes,
Panais et choux-fleurs ! »
Perçant et grêle,
Son cri se mêle
A la voix frêle
Du noir ramoneur.

L'huissier carillonne,
Attend, jure et sonne,
Re-sonne, et la bonne
Qui l'entend trop bien,
Maudissant le traître,
Du lit de son maître
Prompte à disparaître,
Regagne le sien.

Gentille, accorte,
Devant ma porte,
Perrette apporte
Son lait encor chaud ;
Et la portière,
Sous la gouttière,
Pend la volière
De Dame Margot.

 

Le joueur avide,
La mine livide
Et la bourse vide,
Rentre en fulminant ;
Et, sur son passage,
L'ivrogne, plus sage,
Rêvant son breuvage,
Ronfle en fredonnant.

Tout, chez Hortense,
Est en cadence ;
On chante, on danse,
Joue et cætera...
Et, sur la pierre
Un pauvre hère,
La nuit entière,
Souffrit et pleura.

Le malade sonne,
Afin qu'on lui donne
La drogue qu'ordonne
Son vieux médecin,
Tandis que sa belle,
Que l'amour appelle
Au plaisir fidèle,
Feint d'aller au bain.

Quand vers Cythère,
Le solitaire,
Avec mystère
Dirige ses pas,
La diligence
Part pour Mayence,
Bordeaux, Florence,
Ou les Pays-Bas.

« Adieu donc, mon père !
Adieu donc, mon frère !
Adieu donc, ma mère !
Adieu, mes petits ! »
Les chevaux hennissent,
Les fouets retentissent,
Les vitres frémissent :
Les voilà partis !

Dans chaque rue (chantez ru-e, en détachant les syllabes)
Plus parcourue, (idem)
La foule accrue (idem)
Grossit tout-à-coup :
Grands, valetaille,
Vieillards, marmaille,
Bourgeois, canaille
Abondent partout !

Ah ! Quelle cohue ! (co-hu-e)
Ma tête est perdue, (idem)
Moulue et fendue (idem)
Où donc me cacher ?
Jamais mon oreille
N'eut frayeur pareille !
Tout Paris s'éveille...
Allons nous coucher !

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