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La révolte d'Etienne Marcel
 
Le journal de Paris
1358

La révolte d'Etienne Marcel,
première révolution française
ou coup d'état avorté d'un opportuniste ?
Le Contexte


Nous sommes le 31 juillet 1358..

Le prévôt de Paris, c'est à dire l'équivalent du maire, Etienne Marcel, est massacré par le peuple de Paris.

Pourquoi en est-on arrivé là ?

Au milieu du XIVe siècle, la France, bien que pays le plus puissant d'Europe médiévale, souffre de mille maux.

La Grande Peste de 1347 l'a frappée comme tout l'ouest du continent, exterminant par endroits la moitié de la population. La guerre des Valois contre leurs cousins anglais, que l'on appellera beaucoup plus tard «guerre de Cent Ans», saigne par ailleurs le royaume.

Les difficultés de la noblesse et de la monarchie éveillent chez les bourgeois de la capitale le désir de s'émanciper, à l'image de leurs homologues des républiques urbaines de Flandre ou d'Italie. La France va ainsi connaître une amorce de révolution comparable en bien des points à celle qui surviendra 440 ans plus tard...

Le roi Jean II le Bon (autrement dit le Brave), comme ses prédécesseurs, ne dispose d'autre ressource que les revenus de son domaine. Faute d'impôt permanent, il doit convoquer les états généraux chaque fois qu'il a un besoin pressant d'argent. C'est le cas en 1355 pour recruter des troupes et faire face à la menace anglaise...

Profitant de la faiblesse du monarque, les trois ordres, délibérant en commun, établissent en 26 jours, du 2 au 28 décembre 1355, l'égalité devant l'impôt dont ni les princes, ni le roi ne sont dispensés. Ils décident de nommer eux-mêmes les trésoriers et receveurs, ébauchent l'organisation d'une milice nationale où chacun s'armera selon son état et retirent au roi le droit de toucher aux monnaies. Ils élisent une commission de neuf membres (trois par ordre) pour surveiller l'exécution de leurs volontés et lui accordent le droit de requérir le concours de tous contre le roi en cas de besoin. Enfin, ils conviennent de se réunir à nouveau au mois de mars suivant.

Jean de Craon, archevêque de Reims, au nom du clergé, Gauthier de Brienne, duc d'Athènes, au nom de la noblesse, Étienne Marcel, prévôt des marchands de Paris, au nom des bourgeois, communiquent ces résolutions au roi et l'invitent à les accepter. En échange, ils l'autorisent à lever de nouveaux impôts pour un montant de 5 millions de livres parisis en vue d'équiper et entretenir pendant une année l'armée de 30.000 hommes dont il a besoin pour combattre les Anglais. Jean II, dépensier et léger comme il n'est pas permis, accepte sans barguigner. Financièrement, il n'a guère le choix. Politiquement, il ne mesure pas la portée de son geste.

On peut considérer que la France vient de faire sa révolution sans coup férir !

Là-dessus, en septembre 1356, Jean le Bon, parti à la rencontre des Anglais du Prince Noir, est battu à plate couture aux environs de Poitiers malgré une écrasante supériorité numérique.

Suprême humiliation, le roi est capturé par l'ennemi ainsi que son fils cadet Philippe, 17 comtes, un archevêque, 70 barons, 2000 chevaliers et écuyers. Le fils aîné du roi, le dauphin Charles, duc de Normandie, s'enfuit sans demander son reste. La monarchie et la noblesse sont déconsidérées. Les captifs ajoutent à leur discrédit en faisant pressurer les paysans pour payer leur rançon.

À Paris, le dauphin en charge du pouvoir (avec le titre de «lieutenant du roi») n'en mène pas large. Ce jeune homme de 18 ans, malingre et incapable de tenir une épée, n'a-t-il pas fui au plus fort de la bataille ?

Étienne Marcel juge le moment propice pour prendre la main. Convoqués en hâte, les états généraux se réunissent une nouvelle fois le 17 octobre 1356. Au total 800 députés. Le chancelier de France Pierre de Laforest, archevêque de Rouen, prononce le discours d'ouverture en présence du dauphin. Puis Jean de Craon, Philippe de Valois, frère du roi, et Étienne Marcel obtiennent que les États se réunissent rue de l'École-de-Médecine, dans le couvent des Cordeliers, pour discuter des mesures à prendre. 80 députés sont désignés pour les préparer.

Deux semaines plus tard, le dauphin est convoqué en secret aux Cordeliers pour être informé des mesures en question. Brutal ! On lui demande de renvoyer et faire juger le chancelier, le premier président du parlement, le grand chambellan et quatre autres grands officiers royaux, des trésoriers accusés d'avoir falsifié les monnaies. Le Conseil du Roi devra désormais être nommé par les états généraux. Il sera composé de quatre prélats, douze nobles et autant de bourgeois. Au roi, il ne restera que le droit d'approuver ou non ses décisions. En outre, les états généraux exigent la libération de Charles II le Mauvais, roi de Navarre, que Jean le Bon avait fait jeter en prison en représailles de l'assassinat de son favori, le connétable Charles d'Espagne. En échange de quoi, l'assemblée promet au dauphin de financer une armée de 30.000 hommes.

Jean le Bon

Jean le Bon

 

Le dauphin et ses conseillers choisissent de temporiser. Le 31 août 1356, pour la séance de clôture, dans la grande salle du parlement, les députés voient venir au lieu du dauphin le sieur du Hangest. Celui-ci annonce que le dauphin remet sa visite au 3 novembre. Chacun est consterné. Il ne se trouve aucun Mirabeau pour ressouder l'assemblée comme en 1789 ! À bout de ressources, la plupart des députés, à commencer par les nobles, abandonnent la partie et rentrent chez eux.

Le 2 novembre, nouvelle diversion : le dauphin réunit quelques députés réfractaires et leur annonce qu'il doit incontinent partir pour Metz pour rencontrer son oncle l'empereur d'Allemagne Charles IV. Le lendemain, aux Cordeliers, l'évêque de Laon Robert Lecoq, membre du Conseil du Roi, prend le parti des députés, les invite à faire circuler les griefs du peuple et rappelle opportunément que l'Église peut déposer les rois.

Pendant ce temps, le dauphin en appelle aux états des provinces méridionales. Il leur transmet des lettres où il accuse les états généraux de n'avoir «rien conclu ni parfait de ce qui leur avait été proposé» et leur demande de l'argent en urgence. Il n'obtient que de bonnes paroles. Dépité, il doit revenir à Paris et négocier avec Étienne Marcel.

 

Timbre de Jean II le Bon

Jean le Bon

 
Dauphin et prévôt s'affrontent en public

Les deux hommes, chacun à la tête d'une escorte, se rencontrent près de Saint-Germain-l'Auxerrois, le 19 janvier 1357. Charles somme le prévôt de se soumettre. En retour, ce dernier décrète la grève ! Le lendemain, aucun boutiquier ou artisan ne lève le rideau. La capitale se fige dans un lourd silence. Le dauphin sent planer la menace d'une révolte populaire. Sans attendre, dans l'après-midi, il convoque la municipalité et lui concède tout : le renvoi des officiers royaux, l'abandon d'une ordonnance sur la monnaie et une nouvelle convocation des états généraux le 5 février 1357.

Au jour dit, peu de députés répondent à la convocation. Il est vrai que ces séjours à répétition dans la capitale sont coûteux. Les présents, qui sont aussi les plus résolus, clôturent leurs travaux par une Grande Ordonnance. En 60 articles, elle réforme magistralement le cadre du gouvernement : impôts levés par les députés, inviolabilité de ceux-ci, suppression des tribunaux d'exception,... Le dauphin, résigné, promulgue le texte. Mais celui-ci est loin de faire l'unanimité en-dehors de Paris.

Les bourgeois accentuent la pression

Quand, le 23 mars 1357, une trêve est conclue à Bordeaux avec les Anglais et que, de sa prison, le roi Jean fait savoir qu'il révoque les états généraux, seul Paris s'insurge. Le 8 avril, veille de Pâques, l'assemblée oblige le dauphin à désavouer les instructions de son père mais les députés du clergé, avec à leur tête l'archevêque de Reims Jean de Craon, se démarquent et déjà amorcent leur retour dans le camp de la monarchie. En août, le dauphin rétablit les officiers royaux dans leurs charges et le 4 septembre, il reprend le droit de vendre et donner à ferme des offices.

Étienne Marcel doit ruser d'autant plus que le dauphin, parti en tournée en Normandie, est hors de sa portée. Il demande au dauphin de rentrer et met pour seules conditions à la soumission des Parisiens le retour de l'évêque de Laon au Conseil du Roi et la convocation des députés de vingt ou trente villes.

Le dauphin accepte et le 7 novembre se réunissent à nouveau une poignée de députés. Dès le lendemain, à l'initiative de Jean de Picquigny, gouverneur de l'Artois, ils réclament à nouveau la libération de Charles le Mauvais et, pour plus de sûreté, organisent son évasion. Le roi de Navarre fait une entrée triomphale à Paris le 29 novembre et harangue les bourgeois d'une tribune improvisée.

Le prévôt des marchands voit poindre son objectif inavoué : l'autonomie de Paris et des grandes villes du royaume à l'instar des cités flamandes (Bruges, Anvers,...). Il fait distribuer à ses fidèles un chaperon aux couleurs de la ville, rouge et bleu, en signe de reconnaissance.

Le Dauphin en appelle à l'opinion publique

Le dauphin, profitant de l'absence du roi de Navarre, reprend l'initiative. Le 11 janvier, à cheval, escorté de seulement quelques hommes, il s'adresse en personne aux bourgeois des halles et déclare «qu'il eut déjà chassé les Anglais s'il avait eu l'administration des finances ; mais il n'avait pas touché un seul denier de tout l'argent levé sur la nation, depuis que les États gouvernaient...» Habilement, il s'interroge alors sur ce qu'est devenu cet argent. La foule l'acclame.

Dès le lendemain, le prévôt lui-même répond publiquement au dauphin. Une nouvelle fois, les deux hommes se rencontrent, cette fois rue Saint-Denis. Le chancelier de Normandie prend la parole au nom du dauphin mais il est coupé par l'échevin Charles Toussac, redoutable orateur au service du prévôt. Le dauphin, dépité, tourne bride et abandonne la partie.

L'atmosphère devient explosive. En témoigne un fait divers. Le 24 janvier 1358, rue Neuve-Saint-Merri, un clerc croise le trésorier du dauphin et lui réclame le prix de deux chevaux récemment vendus au duc de Normandie. Éconduit, il l'assassine à coups de couteau et se réfugie dans l'église voisine. Le maréchal de Normandie fait défoncer la porte de l'église, s'empare du meurtrier et le fait pendre au gibet de Montfaucon. Des bourgeois, indignés, dépendent le corps et lui accordent des funérailles solennelles.

Pendant ce temps, Anglais et mercenaires de la pire espèce saccagent les alentours de Paris sans qu'interviennent les troupes royales et bien que le dauphin ait troqué son titre de «lieutenant du roi» pour celui de régent. La population a peur d'une attaque de l'ennemi.

 

Massacre au saut du lit

Le 22 février 1358, le tocsin sonne. La foule s'assemble autour de l'église Saint-Éloi et de là, guidée par le prévôt, se dirige vers le palais du dauphin. Elle investit ses appartements. Le prévôt lui-même pénètre dans sa chambre.

Les émeutiers et lui se trouvent face à face avec le dauphin et ses conseillers ; parmi eux les maréchaux de Champagne et de Normandie, Robert de Clermont et Jean de Conflans, qui dirigent les troupes royales.

Étienne Marcel interpelle le régent et le presse d'agir contre les Anglais. «C'est à ceux qui reçoivent les profits de pourvoir à la défense du royaume», réplique Charles. Le ton monte. Étienne Marcel ordonne enfin à ses compagnons : «Faites en bref».

Le maréchal de Champagne est alors massacré aux pieds du régent. L'autre maréchal est tué à son tour dans un cabinet voisin. Le dauphin demande grâce. Le prévôt, alors, le décoiffe et le couvre du chaperon rouge et bleu de ses partisans. Lui-même se couvre du chaperon de brunette noire à franges d'or du régent et sort de la pièce.

Le surlendemain, le régent, mandé au parlement, se voit obliger d'accepter en son conseil Étienne Marcel en personne et ses adjoints. Le 26 février 1358, le roi de Navarre rentre à Paris.

Le régent Charles comprend qu'il est désormais prisonnier des bourgeois et de leurs alliés navarrais. Mais, une nuit de mars, un fidèle conseiller l'entraîne vers la Seine. Une barque l'attend. Cette fois, le Capétien ne sera pas rattrappé comme son lointain descendant, beaucoup plus tard à Varennes !

Révélation d'un grand homme d'État

Sitôt libre, le régent que l'on jugeait faible et timoré voit ses facultés démultipliées. Il court à Senlis où il préside le 25 mars les états de Picardie et de Beauvaisis, puis à Provins le 9 avril pour les états de Champagne. Entre temps, il s'empare de la place de Meaux qui commande l'une des voies d'approvisionnement de la capitale.

Pendant ce temps, Étienne Marcel se prépare à la guerre. Il s'empare de l'artillerie du Louvre et renforce les fortifications. Le fait est qu'il se voyait à la tête d'un mouvement général d'émancipation des communes ; il n'est plus que le chef d'une ville assiégée, plus ou moins isolée du reste du royaume. Il est abandonné, au moins pour un temps, par le roi de Navarre lui-même. Peu soucieux de servir la bourgeoisie contre la noblesse, il va à la rencontre du régent et feint de se réconcilier avec lui.

Les états généraux s'assemblent le 4 mai à Compiègne. Ils se séparent dix jours plus tard après avoir rédigé une ordonnance qui condamne le gouvernement de Paris.

Alliance impossible entre bourgeois et paysans

Et voilà que monte des campagnes du Beauvaisis et des provinces environnant Paris un immense rugissement : les laboureurs se soulèvent à leur tour contre les nobles : «Les nobles trahissent et honnissent le royaume», clament-ils selon le chroniqueur Froissart, en référence à la bataille de Poitiers. C'est la Grande Jacquerie.

La grande jacquerie

Le prévôt tente de récupérer à son profit cette masse déchaînée. Mais il échoue à la discipliner : «Envoiasmes bien trois cents combattants de nos gens et lettres de créance pour euls faire désister des grands mauls qu'ils faisaient,»écrira-t-il plus tard. À défaut, il les convainc d'attaquer la forteresse de Meaux. Le 9 juin, les paysans et les Parisiens, sous le commandement d'un épicier, Pierre Gilles, se lancent à l'assaut de la place. C'est un désastre et dès lors, les nobles reprennent le dessus. La répression est impitoyable.

Étienne Marcel voit poindre l'échec de son mouvement. Le 11 juillet, il lance un appel désespéré aux représentants des autres communes du royaume dans lequel il dénonce le comportement des nobles : «Très grant multitude de nobles... par manière universel de nobles universamment contre non noble, sans faire distinction quelconque de coulpables ou non coulpables, de bons ou mauvais,... ont ars [brûlé] les villes, tué les bonnes gens des païs, sens pitié et miséricorde quelconques, robé [dérobé] et pillié tout quanques ils ont trouvé, femmes, enfants, prestres, religieux... les calices, sanctuaires, chapes ortées et robes, les prêtres célébreus priz et les calices ortés de devant euls... les églises, abbayes, priorez et églises parochiaulx... mis à rançon, les pucelles corrompues et les femmes violées en présence de leurs maris, et briervement fait plus de maulx plus cruellement et plus inhumainement que oncques ne firent les Wandres, ne Sarrazins...»

Le prévôt en appelle par la même occasion au roi de Navarre, sans rien ignorer pourtant de sa brutalité et de sa versatilité. Tant qu'à choisir, ses compagnons d'infortune préfèrent encore le régent, représentant de la monarchie légitime. Ils se détachent de lui. Parmi eux l'échevin Jean Maillart, chef de file des partisans du régent.

Revanche royale

Dans la nuit du 31 juillet au 1er août, les bannières royales se déploient dans les rues de Paris au cri de «Montjoie et Saint-Denis !» La maison aux piliers de la place de Grève, où Étienne Marcel a établi le siège de la municipalité, est prise d'assaut.

La mort d'Etienne Marcel

Le prévôt lui-même est assassiné, sans doute à proximité de la porte Saint-Antoine. On murmure qu'il aurait voulu ouvrir la porte au roi de Navarre.

Absurde, car ce dernier pouvait entrer dans la ville à sa guise et il y avait pris la parole pas plus tard que le 22 juillet. Le 2 août 1358, le régent fait son entrée par cette même porte, précédé de Jean Maillart. Sur le passage du cortège, on a placé les corps d'Étienne Marcel et de ses derniers fidèles, auprès de leurs têtes tranchées.

Quelques années plus tard, devenu roi sous le nom de Charles V le Sage, le régent n'aura rien de plus pressé que de faire édifier la Bastille afin de tenir en respect les turbulents Parisiens. De tous ces malheurs qui auraient pu entraîner révolution et séditions, la monarchie et l'État vont paradoxalement sortir renforcés.


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Etienne Marcel surpris porte
St Antoine

 

Que cultivaient nos ancêtres du MoyenAge ?

Les légumes dans l'Europe médiévale

Il ne suffit pas de reconnaître comme comestibles des fruits et des légumes pour qu'ils soient consommés. Ils sont le symbole d'un statut social ou des idées d'une époque sur la diététique : la période médiévale réservait les légumes (trop proche de la terre) à la consommation populaire et préférait la consommation des fruits (plus aériens, donc proche du ciel) pour les élites. D'après Jean Louis
Flandrin, on trouve seulement 9 % de recettes de légumes dans les livres de cuisine du 14e et du 15e siècle, contre 21 % à partir du 18e siècle. On trouve également davantage de recettes de légumes dans les livres du bassin méditerranéen (Italie, Catalogne) : survivance des traditions romaines et influences de la culture arabe pour les pays du sud, influence des traditions germaniques pour les pays du nord ?

La consommation des plantes comestibles dépend également de leur présence dans un lieu donné et à une époque donnée. Lorsqu'on se réfère à la liste des plantes dont la culture est recommandée, vers 800, par le capitulaire de Charlemagne (De villis vel curtis imperialibus : des terres et cours impériales, paragraphe 70), on peut faire des observations très instructives :

- on y trouve des légumes connus actuellement (concombre, pois chiche, céleri, carotte, chou, poireau, pois, laitue, ail, oignon, échalote...), des herbes aromatiques familières (menthe, sauge, cumin, anis, persil, sarriette, coriandre...).

- on y trouve des plantes "oubliées", soit parce que leur fonction alimentaire ou médicinale a disparu au profit de leur fonction ornementale (lis, rose, glaïeul), soit parce qu'on pense maintenant qu'il s'agit d'herbes sauvages et qu'on a oublié qu'il s'agit de plantes comestibles (tanaisie, herbe à chat, maceron, arroche, mauve...), soit parce que ces plantes ne sont plus connues que des seuls spécialistes (la scille, le méum, le séseli, le cabaret, l'épurge...).

- on constate, dans cette liste, l'absence de légumes considérés comme essentiels actuellement : ils étaient alors inconnus en Europe, parce qu'originaire d'Amérique (pomme de terre, tomate, haricot, courgette...) ou parce qu'ils viennent d'Orient et, comme l'aubergine, arriveront en Europe plus tard dans les bagages des arabes.




Légumes en Europe médiévale :
.
* Artichaut
* Aubergine
* Cardon
* Carotte
* Chou
* Courge médiévale européenne
* Melon
* Panais

Classés dans les herbes à porée :

* Blette
* Epinard
* Poireau

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Tourte médiévale

Qui était Etienne Marcel ?

La famille Marcel est l’une des plus puissantes de la bourgeoisie parisienne.
Étienne Marcel, né entre 1302 et 1310 et mort à Paris le 31juillet 1358, est prévôt des marchands de Paris sous le règne de Jean le Bon. Il se retrouve à la tête du mouvement réformateur qui cherche à instaurer une monarchie française contrôlée en 1357, en affrontant le pouvoir royal exercé par le dauphin. Délégué du tiers état, il joue un rôle considérable au cours des états générauxguerre de Cent Ans : ceux de 1355, avaient pour objectif le contrôle de la fiscalité, ceux de 1356 demandaient le prélèvement de nouveaux impôts et ceux de 1357 devaient régler le paiement de la rançon du roi Jean.

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Etienne Marcel (gravure du 19è siècle)

 

Les États se révélant incapables de résoudre la crise qui accable le royaume, le Dauphin Charles peut reprendre le pouvoir et sauver la couronne des Valois. Étienne Marcel meurt assassiné par les bourgeois parisiens qui considèrent qu’il est allé trop loin dans son opposition et qu’il pourrait livrer la ville aux Anglais.

Étienne Marcel, comme Jacob van Artevelde dans le Comté de Flandre, est une personnalité issue du grand patriciat urbain proche du pouvoir qui s’est illustrée par la défense des petits artisans et compagnons qui forment le gros des citadins. Pour autant, ils ne sont que les catalyseurs les plus connus d’un profond mouvement de réforme répondant à la crise du système féodal : aux XIVe et XVe siècles, la noblesse et le clergé ne tiennent plus le rôle qui leur était initialement imparti dans une société à trois ordres. Les mutations économiques et culturelles donnent lieu à une différentiation au sein du Tiers État de la bourgeoisie qui prend une place incontournable à tous les niveaux de la société. Le mécontentement inhérent à la crise et l’exemple des cités flamandes, italiennes ou de la Hanse lui donnent l’occasion d’essayer de montrer que les villes seraient plus à même de gérer la société et de répondre aux nouveaux impératifs économiques de plus en plus centrés sur le commerce et moins sur la propriété foncière.

Montée en puissance de la bourgeoisie

Depuis la renaissance de l’an mil où elle s’est structurée, la société médiévale a considérablement évolué. L’Europe a fortement progressé techniquement, artistiquement et démographiquement. Les villes se sont développées créant de nouvelles classes sociales centrées sur l’artisanat et le commerce. Le système féodal et religieux à trois ordres instauré depuis le mouvement de la paix de Dieu est adapté à une société agricole et décentralisée. La noblesse protège les terres et rend la justice. Les religieux sont les guides spirituels de la communauté : ils s’occupent des œuvres sociales et contribuent à maintenir et à développer la culture. Les paysans, quant à eux, par leur travail, assurent la fonction productrice.

 

À partir de la fin du XIIIe siècle, l’équilibre entre les trois ordres se rompt. Le développement des villes a nécessité la création d’un État centralisé rendant justice, unifiant la monnaie et devant protéger le pays contre les attaques éventuelles de royaumes capables de lever des armées importantes. Une telle structure doit être financée et l’État a d’autant plus besoin de ressources financières que le système féodal se maintient par la redistribution de richesses vers ses vassaux. Le grand patriciat commerçant possède des ressources financières très abondantes qu’il prête aux princes et aux ecclésiastiques : il devient un acteur incontournable.

Ne disposant pas d’une administration suffisante et voulant limiter la puissance des grands féodaux, les Capétiens délèguent aux bourgeois de plus en plus de pouvoirs politiques, fiscaux et judiciaires créant de véritables zones franches aux grands carrefours commerciaux. La multiplication des affaires à régler a rendu impossible leur seul traitement par les rois et la grande noblesse qui ont alors délégué une partie de leurs pouvoirs judiciaires à des parlements et autres cours de justice. À l’époque, plutôt que d’entretenir une coûteuse administration, les souverains ont pris l’habitude de faire prélever les taxes par de riches particuliers qui leur cèdent le montant souhaité et se remboursent en percevant les impôts pour leur compte, ce qui assure de confortables bénéfices. En Angleterre, les revers de Jean sans TerrePhilippe Auguste avaient conduit les barons anglais à lui imposer en 1215 la Magna Carta, la Grande Charte, qui instituait, entre autres, la liberté des villes et le contrôle de la fiscalité par le Parlement.

En France, Philippe le Bel instaure des États généraux où la noblesse, le clergé et les villes sont représentés, pour avoir une légitimité à lever des impôts y compris sur les terres d’Église et rassembler la nation naissante pour faire bloc contre le pape qui ne peut accepter de telles taxes et proclame la primauté du spirituel sur le temporel (par la bulle pontificale Unam Sanctam de 1302, Boniface VIII revendique l’instauration d’une théocratie).

D’autre part, pour les besoins du commerce, puis pour sa propre ascension sociale le patriciat urbain a pris en charge une partie de la culture, créant des écoles laïques et finançant un mécénat culturel. De la même manière, il finance nombres d’œuvres sociales. La plupart des innovations techniques sont alors le fait de laïcs, ingénieurs, architectes (tels Villard de Honnecourt), artisans (tels Jacoppo et Giovanni di Dondi concepteurs de l’horloge à échappement)… Le clergé perd une partie de son rôle culturel ou social dans les espaces urbains.

Pour obtenir le rôle politique que leur importance croissante dans la société devrait leur donner, de nombreux bourgeois tentent d’être anoblis. C’est la voie que choisit par exemple Robert de Lorris qui, devenu proche conseiller de Jean le Bon, use de son soutien ou d’alliances matrimoniales judicieuses pour placer ses proches. La haute bourgeoisie adopte des comportements qui rappellent ceux de la noblesse : la prévôté organise par exemple en 1330 un tournoi où bourgeois combattent comme des chevaliers. Ceux qui, comme Étienne Marcel, n’appartiennent pas au cercle très restreint du pouvoir sous Jean le Bon et dont la promotion sociale est bloquée deviennent les plus fervents promoteurs d’une réforme politique qui doit aboutir au contrôle de la monarchie par les États.

Étienne Marcel évolue dans ce contexte de crise où les villes deviennent la force politique principale et en particulier Paris, qui est de très de loin la première agglomération d’Occident. Vers 1328, la population parisienne est estimée à 200 000 habitants, ce qui en fait la cité la plus peuplée d’Europe. Cependant en 1348, la Peste noire décime la population.

En tant que capitale elle regroupe une bonne partie de la noblesse (qui doit faire valoir son statut par une vie ostentatoire et dépenser sans compter) et de l’administration. Ces gros consommateurs induisent l’installation de nombreux artisans et d’artistes[24]. Elle est aussi un centre universitaire de premier ordre. Au total, Paris est un énorme centre de consommation qui, grâce au bassin de la Seine, est un point d’échange important de denrées, venant des foires de Champagne, de la riche région normande (et donc de l’Atlantique), mais aussi des régions drapières du Nord (Flandre, Artois, Brabant…).

Paris1400

Paris en 1400

Au XIVe siècle, l’enceinte de Charles V (1364–1380) englobe l’ensemble des actuels 3e et 4e arrondissements et s’étend du Pont Royal à la porte Saint-Denis.

Au total, Paris est le siège de la Cour et de l’administration (palais de la Cité), de l’université et un énorme centre marchand et artisanal : y vivent l’essentiel des représentants des trois ordres.

Étienne Marcel n’est pas par essence contre les Valois. Au contraire les intérêts du roi et ceux des milieux d’affaire parisiens convergent : La guerre entraîne le blocage des routes économiques et la prospérité de Paris passe par la sécurisation de la Seine et des accès au Comté de Flandre. Aux États généraux du 8 mai 1355, on tente de simplifier le calcul de l’impôt pour le rendre plus efficace. Mais les impôts ne rentrent pas et le roi a recours une nouvelle fois aux manipulateurs de la monnaie honnis : il rappelle Jean Poilevillain et Nicolas Braque qu’il nomme respectivement aux Comptes et aux Monnaies. La monnaie est dévaluée une nouvelle fois : Les rentes et loyers diminuent au grand dam de la bourgeoisie, de la noblesse et des prélats: la grogne monte.

 

Monnaie guerre de cent ans

Monnaie royale française

Confronté à la menace anglaise, Jean le Bon convoque les États généraux de langue d’oïl à Paris, dans la grande salle du palais de la Cité, le 2 décembre 1355, pour lever l’armée de 30 000 hommes qu’il juge nécessaire. Étienne Marcel et ses alliés (son cousin Imbert de Lyon, son associé Jean de Saint-Benoît, son prédécesseur à la prévôté des marchands de Paris Jean de Pacy ainsi que ses échevins Pierre Bourdon, Bernard Cocatrix, Charles Toussac et Jean Belot) y sont les principaux représentants des villes. Les États sont extrêmement méfiants quant à la gestion des finances publiques (échaudés par les dévaluations entraînées par les mutations monétaires qui ont fait perdre à la monnaie royale 82 % de sa valeur en un an). La noblesse dont les dévaluations diminuent les revenus (les redevances dues sur leurs terres sont de montant fixe) a un besoin impératif d’une monnaie forte. Les commerçants ont surtout besoin d’une monnaie stable.

monnaies guerre de cent ans

Monnaies d'or du règne de
Jean le Bon

Après les chevauchées du Prince noir en Languedoc et du duc de Lancastre en Artois, les états ont conscience de la nécessité de lever une armée, mais plus encore de financer des garnisons pour défendre les villes. Ils acceptent la levée d’une taxe sur les transactions commerciales de 8 deniers par livre, à la condition de pouvoir en contrôler la mise en œuvre et l’utilisation des fonds prélevés et que soit émise une monnaie forte. Un collège de 9 officiers (3 par ordre) qui prélèveraient la taxe doit être désigné par les États généraux.

Les impôts rentrant mal et la nouvelle monnaie se dévaluant rapidement, les États sont réunis à nouveau en mars 1356 et décident d’élargir l’assiette de l’impôt en taxant aussi les revenus fonciers. Ce qui se révèle difficile car il faudrait une administration capable de quantifier les revenus des contribuables.

Fort de cette armée financée par les États, le roi poursuit le Prince Noir lancé dans une nouvelle chevauchée. Il le rattrape au sud de Poitiers. L’enjeu est plus que militaire : il faut redorer le blason de la noblesse, largement terni depuis le désastre de Crécy et qui de plus est incapable de protéger le peuple des pillages alors que c’est précisément son rôle dans la société médiévale. C’est dans cet esprit qu’il renvoie les troupes envoyées par les villes pour le soutenir à la bataille de Poitiers : c’est au roi et à la noblesse de vaincre. La bataille a lieu le 19 septembre 1356, le roi Jean le Bon, ne voulant pas fuir comme l’avait fait son père à Crécy, se bat héroïquement. Il est fait prisonnier par les Anglais, mais acquiert dans cette affaire un grand prestige et sauve sa couronne. Le Prince noir, impressionné, fait en sorte qu’il soit reçu avec les honneurs durant sa captivité londonienne.

Son fils le dauphin Charles, qui a pu quitter le champ de bataille, assure la régence et tente de négocier avec l’Angleterre pendant que les mercenaires démobilisés, rassemblés en grandes compagnies, pillent les campagnes. Pour éviter de tels débordements, le dauphin propose de créer une armée permanente de 30 000 hommes. Pour cela, il lui faut trouver des financements en levant de nouveaux impôts qu’il demande aux États généraux en les convoquant à nouveau.

L'Ordonnance de 1357

L’ordonnance de 1357

 

La monarchie contrôlée

Les débuts de la régence du dauphin Charles sont difficiles : il n’a que 18 ans, peu de prestige personnel (d’autant qu’il a quitté le champ de bataille de Poitiers contrairement à son père et son frère Philippe le Hardi), peu d’expérience et doit porter sur ses épaules le discrédit des Valois. Il s’entoure des membres du conseil du roi de son père, qui sont très décriés.

Les États généraux se réunissent le 17 octobre 1356. Le dauphin, très affaibli, va se heurter à une forte opposition : Étienne Marcel, à la tête de la bourgeoisie, allié avec les amis de Charles II de Navarre, dit Charles le Mauvais, regroupés autour de l’évêque de Laon, Robert Le Coq. Les États généraux, déclarent le dauphin lieutenant du roi et défenseur du royaume en l’absence de son père et lui adjoignent un conseil de douze représentants de chaque ordre.

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Edouard III et le Prince Noir

 

Les États exigent la destitution des conseillers les plus compromis (honnis pour avoir brutalement dévalué la monnaie à plusieurs reprises), la capacité à élire un conseil qui assistera le roi ainsi que la libération du Navarrais. Le dauphin proche des idées réformatrices n’est pas contre l’octroi d’un rôle plus important des États dans le contrôle de la monarchie. En revanche, la libération de Charles de Navarre est inacceptable car elle mettrait fin au règne des Valois. Pas assez puissant pour pouvoir refuser d’emblée ces propositions, le dauphin ajourne sa réponse (prétextant l’arrivée de messagers de son père), congédie les États généraux et quitte Paris, son frère Louis le futur duc d’Anjou réglant les affaires courantes. Les États généraux sont prorogés et seront convoqués de nouveau le 3 février 1357.

Avant de partir, le 10 décembre 1356, le dauphin publie une ordonnance donnant cours à une nouvelle monnaie, ce qui lui permettrait de remplir ses caisses sans passer par les États. Il s’agit cette fois d’un renforcement monétaire de 25 %, ce qui avantage les propriétaires fonciers : c’est-à-dire la noblesse, le clergé et le patriciat urbain (qui possède une bonne partie de l’immobilier des grandes villes) donc les catégories sociales représentées aux états. Cela provoque une levée de boucliers de la population parisienne qui voit ses loyers croître de 25 %. Étienne, lui choisit le parti des compagnons et des boutiquiers contre la grande bourgeoisie et les spéculateurs qu’il tient pour responsables de ses malheurs dans la succession de Pierre des Essars: Il devient maître de la rue.
Des échauffourées éclatent et Étienne Marcel fait pression sur Louis d’Anjou puis sur le dauphin qui doit révoquer l’ordonnance et rappeler les États généraux.

Pendant ce temps le dauphin va à Metz rendre hommage à son oncle l’empereur Charles IV pour le Dauphiné ce qui lui permet d’obtenir son soutien diplomatique. À son retour en mars 1357, il accepte la promulgation de la « grande ordonnance », esquisse d’une monarchie contrôlée et vaste plan de réorganisation administrative, mais obtient le maintien en captivité de Charles de Navarre. Une commission d’épuration doit destituer et condamner les fonctionnaires fautifs (et particulièrement les collecteurs d’impôts indélicats) et confisquer leurs biens. 9 conseillers du dauphin sont révoqués (Étienne Marcel tient sa vengeance contre Robert de Lorris). Six représentants des États entrent au conseil du roi qui devient un conseil de tutelle. L’administration royale est surveillée de près : les finances, et particulièrement les mutations monétaires et les subsides extraordinaires, sont contrôlées par les États.

 

Une conséquence inattendue de la Guerre de Cent ans: la naissance...du cassoulet !

On raconte que…

Au cours du siège de Castelnaudary pendant la guerre de 100 ans (1337 - 1453), fut cuisiné le premier " estofat " aux fèves.Réunissant toutes les réserves disponibles, les habitants, menacés de famine, mirent en commun tout ce qu’ils avaient pour nourrir les soldats de la ville. Lard, porcs, fèves, saucisses, viandes furent mis à mijoter dans une grande jatte.
Après ce plantureux repas fort bien arrosé, les Chauriens se précipitèrent sur l'armée anglaise, qui prise de panique, leva le siège et ne s'arrêta, selon la légende, qu' aux rives de la Manche.

Certains historiens s'attachent à une toute autre version selon laquelle la culture du haricot n'aurait été introduite en France qu'au XVIIème siècle par les arabes. D'autres assurent que les haricots étaient connus dans notre pays bien avant la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb, et étaient cultivés abondamment dans le Sud-Ouest.

Si l'origine du Cassoulet parait bien difficile à établir, l'étymologie du nom est plus communément admise: les potiers d'Issel, petit village situé à 8 kilomètres de Castelnaudary, fabriquaient des récipients en terre cuite, appelés Cassoles, et dans lesquels mijotait ...le Cassoulet.

 

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Le blason du roi de France

 

A l’époque...

1337: Edouard III d'Angleterre affirme ses prétentions à la couronne de France. Les trois grandes villes flamandes, grands centres textiles, Gand, Bruges et Ypres, choisissent le camp anglais.

1346 Edouard III vainqueur des Français à Crécy

1346 La peste noire sévit en Europe. Accusés de propager la maladie, les juifs d'Allemagne sont persécutés et se réfugient en Pologne.

La peste noire vers 1350

La peste noire vers 1350

 

1353 Parution des Voyages d'Ibn Battuta en terres d'Islam

Parution du Decameron de Boccace

1356 Les musulmans menacent l'Europe. Le Prince Noir bat et fait prisonnier Jean II le Bon à la bataille de Poitiers.

1364 Fondation de l'université de Cracovie par Casimir III

1368 Les Mongols sont chassés de Pékin. Les Thai détruisent Angkor.

1370 Début de la rédaction des Chroniques de Froissart.

1373 Première manifestation du gothique flamboyant.

1377 Première quarantaine connue, imposée par venise à Raguse pour arrêter la progression de la peste venue d'Orient.

Chroniques de Froissart

Chroniques de Froissart

Qui était Etienne Marcel ?

(suite)

La nouvelle de l’acceptation par Jean le Bon du premier traité de Londres qui cède le tiers du territoire à l’Angleterre provoque un tollé dont Étienne Marcel va profiter. Un proche du dauphin est assassiné le 24 janvier 1358. Le meurtrier (le valet d’un changeur parisien) est saisi alors qu’il se réfugiait dans une église et le dauphin fait de son exécution un exemple. Étienne Marcel exploite les esprits qui s’échauffent : il y a deux cortèges funèbres, celui de la victime suivi par le dauphin et celui du meurtrier qui est lui suivi par la bourgeoisie parisienne. Le 22 février 1358, Étienne Marcel déclenche une émeute réunissant trois mille personnes qu’il a convoquées en armes. La foule surprend Regnault d’Acy, l’un des négociateurs du Traité de Londres qui a rapporté la nouvelle à Paris. Il se réfugie dans une pâtisserie où on l’égorge férocement avec ses proches.

 

Puis la foule envahit le Palais de la Cité pour affronter le régent. Étienne Marcel et certains de ses partisans parviennent à sa chambre dans le but de l’impressionner pour pouvoir mieux le contrôler. Il s’exclame : « Sire, ne vous ébahissez pas des choses que vous allez voir, car elles ont été décidées par nous, et il convient qu’elles soient faites ». Le maréchal de Champagne Jean de Conflans et le maréchal de Normandie Robert de Clermont sont tués devant le prince, qui est couvert de leur sang et croit son existence menacée. Marcel l’oblige à coiffer le chaperon rouge et bleu des émeutiers (aux couleurs de Paris) alors que lui même met le chapeau du Dauphin et à renouveler l’ordonnance de 1357.

Il l’épargne car il le sous-estime et pense pouvoir le contrôler aisément : c’est une lourde erreur. Fort de l’ascendant qu’il estime avoir sur le Dauphin qu’il va faire nommer régent, il pense pouvoir se passer de Charles de Navarre qu’il pousse à quitter Paris. Mais, le timide et frêle dauphin se révélera être un redoutable politique. De fait, jamais Étienne Marcel ne parviendra à le contrôler, même si dans les premiers temps le futur monarque n’avait pas assez de pouvoir pour affronter ce redoutable tribun.

Étienne Marcel se dirige ensuite sur la place de Grève où il remercie la foule de les encourager à éliminer « les traîtres du royaume ». Il écrit aux villes de provinces pour justifier son geste, mais seules Amiens et Arras donnent des signes de soutien. Il force ensuite le dauphin qui tant qu’il est à Paris reste sous la pression éventuelle de la rue, à ratifier le meurtre de ses conseillers. Le dauphin ne peut qu’accepter un nouveau changement institutionnel : son conseil est épuré (quatre Bourgeois y rentrent), le gouvernement et les finances sont aux mains des États, Charles le Mauvais reçoit un commandement militaire et de quoi financer une armée de 1 000 hommes, le dauphin obtient de devenir régent du royaume ce qui permet de ne plus tenir compte des décisions du roi tant qu’il est en captivité (et en particulier des traités de paix inacceptables) .

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Etienne Marcel (miniature du 15è siècle)

Pour ratifier cette nouvelle ordonnance et en particulier valider son contenu fiscal il faut l’accord de la noblesse dont une partie ne veut plus se réunir à Paris (en particulier Champenois et Bourguignons scandalisés par l’assassinat des maréchaux). La noblesse doit se réunir à Senlis. C’est l’occasion qu’attendait le dauphin pour quitter Paris (ce qu’il fait le 17 mars). Étienne Marcel, pensant le contrôler lui adjoint dix Bourgeois pour le représenter et surveiller le dauphin.

Il participe aux États de Champagne qui ont lieu le 9 avril à Provins, il est soutenu par la noblesse de l’Est du royaume et les délégués parisiens sont mis en difficulté. Fort de ce soutien, le dauphin s’empare des forteresses de Montereau et de Meaux. L’accès de Paris par l’Est est bloqué. Au Sud et à l’Ouest les compagnies écument le pays. Il ne reste que l’accès par le nord qui préserve l’accès de Paris aux villes du Comté de Flandre. Les accès fluviaux ayant été bloqués, Étienne Marcel doit réagir pour empêcher l’asphyxie économique de la capitale.

Le 18 avril il envoie son défi au dauphin. La ville se prépare au combat : on creuse des fossés, le remblai constituant un talus pour arrêter les tirs d’artillerie. On finance ces travaux par une mutation monétaire et en prélevant un impôt, ce qui diminue la confiance des Parisiens envers le gouvernement des États.

Le dauphin réuni alors les États généraux à Compiègne. Ils décident le prélèvement d’un impôt contrôlé par les États, un renforcement monétaire (la monnaie ne devant plus bouger jusqu’en 1359), par contre ils abandonnent la volonté de contrôler le conseil du dauphin.

Jacqueries

Les Jacques et leurs alliés parisiens sont surpris par une charge de chevalerie à bout portant alors qu’ils donnent l’assaut à la forteresse du Marché de Meaux où est retranchée la famille du Dauphin.

Le 28 mai 1358, les paysans de Saint-Leu-d’Esserent, près de Creil dans l’Oise excédés par les levées fiscales votées à Compiègne et destinées à mettre le pays en défense, se rebellent. Rapidement les exactions contre les nobles se multiplient au nord de Paris, zone épargnée par les compagnies et tenue ni par les Navarrais ni par les troupes du dauphin. 5 000 hommes se regroupent rapidement autour d’un chef charismatique : Guillaume Carle, connu sous le nom que lui attribue Froissart : Jacques Bonhomme. Il reçoit très rapidement des renforts de la part d’Étienne Marcel (300 hommes menés par Jean Vaillant), afin de libérer Paris de l’encerclement que le dauphin est en train de réaliser en préservant l’accès nord qui permet de communiquer avec les puissantes villes du Comté de Flandre . L’alliance avec Étienne Marcel semble réussir lorsque les Jacques s’emparent du château d’Ermenonville.

Le 9 juin, les hommes du prévôt de Paris et une partie des Jacques (environ mille hommes) conduisent un assaut sur la forteresse du Marché de Meaux où sont logés le régent et sa famille pour s’assurer de sa personne. C’est un échec : alors que les Jacques se ruent à l’assaut de la forteresse, ils sont balayés par une charge de cavalerie menée par le comte de Foix, Gaston Phébus, et le captal de Buch, Jean de Grailly.

Mais le gros des forces de Guillaume Carle veut en découdre à Mello, bourgade du Beauvaisis le 10 juin. Écarté du pouvoir par Étienne Marcel qui a trop vite cru contrôler le régent après l’assassinat des maréchaux, Charles le Mauvais doit reprendre la main et montrer au Prévot de Paris que son soutien militaire est indispensable. Pressé par la noblesse et particulièrement par les Picquigny auxquels il doit la liberté et dont le frère vient d’être tué par les Jacques, Charles le Mauvais y voit le moyen d’en devenir le chef. D’autre part, les marchands pourraient voir d’un bon œil que l’on sécurise les axes commerciaux. Il prend la tête de la répression, engage des mercenaires anglais et rallie la noblesse. Il s’empare par ruse de Guillaume Carle venu négocier et charge les Jacques décapités. C’est un massacre et la répression qui s’en suit est très dure : quiconque est convaincu d’avoir été de la compagnie des jacques est pendu sans jugement. La jacquerie se termine dans un bain de sang dont Charles le Mauvais porte la responsabilité alors que le dauphin a su garder les mains propres.

Le siège de Paris et la mort d’Étienne Marcel

Une fois la jacquerie écrasée, Charles de Navarre, rentre à Paris le 14 juin 1358. Il pense avoir rallié à lui la noblesse, mais une grande partie des seigneurs qui était à ses côtés contre les Jacques ne le suit pas dans cette démarche et reste derrière le régent qui a su gagner leur confiance. Charles le Mauvais s’établit à Saint-Denis.
Il est fait capitaine de Paris par acclamation et Étienne Marcel envoie des lettres dans toutes les villes du royaume pour qu’il soit fait « capitaine universel » . L’objectif est de créer une grande ligue urbaine et d’opérer un changement dynastique en faveur du Navarrais.

 

On engage des archers anglais pour pallier les nombreuses défections de chevaliers qui ont quitté les rangs de l’armée de Charles le Mauvais et assiègent Paris avec le dauphin à partir du 29 juin. Ce dernier se voit encore renforcé par l’arrivée de nombreuses compagnies qui voient dans le pillage de Paris une bonne affaire. Ces troupes remportent quelques escarmouches contre les troupes d’Étienne Marcel ou du Navarrais.

Le dauphin veut à tout prix éviter un bain de sang qui le discréditerait et souhaite une solution négociée. Il ne fait donc pas donner l’assaut et continue le blocus en espérant que la situation change. Mais les mercenaires anglais qui défendent la capitale sont considérés comme ennemis et s’attirent l’inimitié des Parisiens. Le 21 juillet, à la suite d’une rixe de taverne qui dégénère en combat de rue 34 archers anglais sont massacrés. Les Parisiens en armes en saisissent 400 qu’ils veulent soumettre à rançon.

Le lendemain, Étienne Marcel, Robert Le Coq et Charles de Navarre réunissent la population place de Grève pour calmer les esprits, mais les évènements leur échappent et la foule réclame de les débarrasser des Anglais. Pour maîtriser la foule (8 000 piétons et 1 600 cavaliers en arme), ils la conduisent par groupes distincts vers les mercenaires en embuscade ; ceux-ci taillent les Parisiens en pièces : 600 à 700 meurent dans ces affrontements. Les Parisiens suspectent Charles de Navarre d’avoir prévenu les mercenaires de leur arrivée (il les a quittés avant le combat). Leurs chefs soutenant les ennemis du pays contre le régent et contre la population, les Parisiens se sentent trahis et se désolidarisent d’Étienne Marcel, d’autant que Charles de Navarre attend son frère Philippe et des renforts anglais. Mais la nouvelle du massacre des Parisiens fait vite le tour de la ville et Étienne Marcel est hué à son retour à Paris.

 

La rumeur enfle rapidement : on dit que Philippe de Navarre. L’échevin Jean Maillart, aidé de Jehan Pastoret, président du Parlement de Paris, et du gentilhomme et chevalier Pépin des Essart, convainquent les bourgeois de demander l’aide du régent. Le 31 juillet 1358, à l’aube, Étienne Marcel en compagnie du trésorier de Charles de Navarre essaye de se faire remettre les clefs de la porte de Saint-Denis mais se heurte au refus de Jean Maillard. N’insistant pas il tente sa chance à la porte Saint-Antoine, mais Jean Maillart a sonné l’alerte et rameute le maximum de monde : Étienne Marcel surpris est sommé de crier « Montjoie au roi et au Duc. ». Après hésitation il s’écrie « Montjoie au roi. ». Il est apostrophé, la foule gronde. Son sort est déjà scellé : au signal convenu (« Qu’est ce que ceci ? »), il est massacré avec ses suivants.

France_1350.

La France pendant la guerre
de cent ans

Le dauphin qui ne croit plus en une reddition est en train de se diriger vers le Dauphiné quand on lui apprend les nouvelles en provenance de Paris. Il entre dans Paris le 2 août triomphalement, il a les mains propres. Pardonnant aux Parisiens (il n’y a que très peu de répression, seules quinze personnes sont exécutées pour trahison), il veille à ne pas spolier les proches des exécutés tout en récompensant ses alliés. Par exemple, la riche veuve de l’échevin Charles Toussac exécuté le 2 août est mariée avec Pierre de Dormans : Le roi récompense Jean de Dormans (un de ses fidèles) en plaçant son frère et il ne spolie pas de son héritage la veuve de son opposant.

Les conséquences de l’échec d’Étienne Marcel

 

La prévôté de Paris

La prévôté d’Étienne Marcel marque l’apogée du rôle politique de cette charge : Après l’échec d’Étienne Marcel, les pouvoirs de la prévôté de Paris sont réduits. En 1382, des émeutes antifiscales éclatent en France où les impôts persistent malgré le retour de la paix. Les artisans rouennais se révoltent lors des Harelles. Une émeute similaire a lieu le 1er mars 1382 à Paris la foule prend possession de 2 000 à 3 000 maillets (d’où le nom révolte des maillotins) entreposés à l’hôtel de ville en prévision d’une attaque. Ils libèrent ensuite Hugues Aubriot qui fut prévôt sous Charles V, mais celui-ci refuse de prendre la tête du mouvement. Sans chef la révolte tourne court et est vite réprimée, alors que dirigée par un personnage de la trempe d’Étienne Marcel elle aurait facilement pu se propager à toutes villes du royaume. En 1383, à la suite de la révolte avortée des Maillotins, la prévôté des marchands est confondue avec la prévôté de Paris (c’est donc un officier nommé par le roi qui dirige la capitale) et les juridictions des métiers dissoutes.

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Charles V le Sage

En 1413, les Parisiens tentent une nouvelle fois d’instaurer un régime de monarchie contrôlée : les cabochiens, soutenus par Jean sans Peur et l’université de Paris imposent à Charles V I'ordonnance cabochienne, qui reprend les principes de la Grande ordonnance de 1357. Mais les exactions des cabochiens désolidarisent les parisiens et cette révolte est sévèrement réprimée par les Armagnacs. Sa durée d’application est tout aussi courte que celle de la Grande ordonnance de 1357.

Partiellement reconstituée en 1409, la prévôté reste dès lors subordonnée au Roi. Les prévôts sont de plus recrutés parmi les officiers royaux (gens de justice ou de finance), jusqu’à la suppression de la fonction par la Révolution française. Le pouvoir central reste toujours méfiant face au risque de reconstitution d’un pouvoir parisien fort.

 

L’évolution de la monarchie

 

Charles V est profondément marqué par les révoltes parisiennes de 1358 où il fut menacé physiquement durant la journée du 22 février : il fait ériger la Bastille sur ses fonds propres. Cette forteresse a deux fonctions : elle prévient toute invasion par la porte Saint-Antoine, protégeant aussi l’hôtel Saint-Pol, séjour préféré de la famille royale ; et, en cas d’insurrection dans la capitale, elle couvre la route qui mène au château de Vincennes qui lui sert de résidence hors de Paris.

De manière plus générale la révolte parisienne, la jacquerie ou plus tard la révolte des paysans anglais de 1390 représentent une menace pour l’ordre social féodal. La formation en masse d’archers ou d’arbalétriers dans la population et de garnisons pour défendre les villes contre les chevauchées anglaises, donnent un poids militaire à d’autres classes sociales que la seule noblesse. C’est pour cette raison qu’en France, sous Charles VI, cette dernière demande et obtient la suppression des archers formés après décision de Charles V[91], ce qui vaut aux Français d’être à nouveau surclassés par les archers anglaisbataille d’Azincourt.

La mort brutale d’Étienne Marcel met aussi fin à la tentative de mise en place d’une monarchie contrôlée en France au XIVe siècle. Constatant l’échec de cette tentative qu’il a soutenu au départ, Charles V opte pour un régime monarchique, basé sur l’État de droit (la justice étant l’un des piliers du prestige royal depuis Saint Louis), la décentralisation (via la politique des apanages) et la garantie par l’État de la sécurité physique (par l’instauration d’une armée permanente) et monétaire (par la création du franc).

Il finance cette politique qui restaure l’autorité royale par l’instauration d’impôts permanents. Le commerce en France ne pouvant se faire sans la sécurisation des axes commerciaux terrestres, la bourgeoisie finit par accepter un État fort financé par une fiscalité lourde qui évolue progressivement vers l’absolutisme du XVIIe siècle.

 



 

1337 à 1380
 
 
La guerre de Cent Ans (début)

Le 1er février 1328, le roi de France Charles IV le Bel, troisième et dernier fils de Philippe le Bel, meurt sans postérité mâle comme ses frères aînés mais laisse une femme enceinte. Le jour même, les Grands du royaume attribuent la régence au comte Philippe de Valois, dont le père, Charles, était le frère cadet de Philippe le Bel.

Lorsqu'arrive le jour de l'accouchement, c'est une fille qui naît. La coutume excluant les femmes de la succession au trône, Philippe de Valois est désigné roi sous le nom de Philippe VI, au détriment d'autres prétendants dont le roi d'Angleterre Édouard III.

Dix ans plus tard, à la faveur d'une obscure querelle, le roi Édouard III revendique le trône de France. Il va s'ensuivre un conflit à multiples rebondissements entre les rois de France et d'Angleterre, entrecoupé de longues trêves...

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Soldats anglais de l'époque

Beaucoup plus tard, au XIXe siècle, les historiens français conviendront de désigner cette longue période sous le nom de guerre de Cent Ans.

De désastre en désastre

Le roi d'Angleterre, bien qu'avec des ressources moindres, a d'abord l'avantage sur son cousin et rival, Philippe VI. La flotte française est détruite dans le port flamand de l'Écluse, en aval de Bruges, le 24 juin 1340.

Le roi et ses troupes débarquent enfin en Normandie. Les Anglais ne cherchent pas d'affrontement frontal mais souhaitent seulement piller les campagnes à travers quelques meurtrières «chevauchées». Mais l'ost (armée féodale) de Philippe VI se porte au-devant d'eux et leur impose le combat. Contre toute attente, celui-ci se solde par une première victoire de l'infanterie anglaise sur la chevalerie française, le 26 août 1346, à Crécy, près de la Somme.

Les Anglais s'emparent là-dessus de Calais. Fort de ses premiers succès, le roi Édouard III consent à signer une trêve d'un an avec Philippe VI de Valois. Celle-ci est prolongée de quelques années du fait de la Grande Peste. Le terrible virus s'est installé en Europe à la faveur de l'accostage d'une nef en provenance d'Asie dans les ports de Marseille et de Gênes en 1347. Il va frapper en quelques mois la plupart des régions d'Europe et tuer jusqu'à 40% de la population de certaines d'entre elles. Moins de dix ans plus tard, profitant d'un conflit entre le nouveau roi de France Jean II le Bon et son gendre, le roi de Navarre, Édouard III rompt pour de bon la trêve.

Parti de Bordeaux, le fils du roi anglais, surnommé le Prince noir, lance une grande chevauchée vers la Loire, en vue de piller quelque peu les paysans et les bourgeois. Le roi Jean II le Bon se porte à sa rencontre avec son armée de chevaliers. Bien que plus nombreuse, celle-ci est écrasée à Poitiers et le roi de France est même capturé.

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La bataille de Poitiers (1356).

Jean II le Bon est fait prisonnier par les Anglais

 

La France dépecée

Le désastre de Poitiers survient peu après celui de Crécy et plonge le royaume capétien dans l'une des plus graves crises de son histoire. Les paysans, oppressés de taxes, se retournent contre les seigneurs, qui se sont montrés indignes à la bataille, tandis que les bourgeois de Paris et des villes du nord envisagent de soumettre la monarchie à leurs volontés.

Les états généraux de langue d'oïl (autrement dit les représentants des Français du nord) se réunissent sans attendre et décident de libérer Charles II le Mauvais, roi de Navarre, cousin et beau-frère du roi captif, que ce dernier avait incarcéré pour le punir de ses manigances. Les bourgeois attendent du Navarrais qu'il les protège dans la défaite.

Charles le Mauvais veut mettre à profit la captivité du roi pour prendre sa revanche sur la décision de 1328 qui avait écarté sa lignée de la couronne au profit des Valois.

Il négocie avec les Anglais la cession à son profit de quelques provinces comme la Normandie. Il met fin par ailleurs à la Jacquerie paysanne et entre dans une alliance contre nature avec le prévôt des marchands de Paris, Étienne Marcel.

Mais le 31 juillet 1358, comme le prévôt s'apprête à donner les clés de la ville à Charles le Mauvais devant la porte Saint-Antoine, Jean Maillart, un échevin fidèle à la royauté, le fait mettre à mort ainsi que ses comparses.

Le traité de Brétigny

L'héritier de la couronne, le dauphin Charles, qui a surpris tout le monde par sa force de caractère, peut rentrer en triomphe dans sa capitale le 2 août 1358 (quelques années plus tard, devenu roi sous le nom de Charles V le Sage, il n'aura rien de plus pressé que de faire édifier la Bastille afin de tenir en respect les turbulents Parisiens). De tous ces malheurs qui auraient pu entraîner révolution et séditions, la monarchie et l'État vont paradoxalement sortir renforcés.

Le régent convoque à nouveau les états généraux et ceux-ci dénoncent les accords signés par Jean II avec Édouard III, qui abandonnent à l'Angleterre toutes les anciennes possessions des Plantagenêt, de la Normandie à l'Aquitaine (ou Guyenne) en passant par le Limousin, le Quercy, l'Anjou,...

Édouard III débarque à Calais et tente en vain d'entrer à Reims pour s'y faire sacrer roi de France. Sur le chemin du retour, craignant que sa chevauchée ne s'achève sur un désastre, il signe enfin des préliminaires de paix à Brétigny, près de Chartres, le 8 mai 1360. Ils seront ratifiés à Calais le 24 octobre 1360.

Le traité se solde par des amputations importantes du territoire national. L'Angleterre reçoit l'Aquitaine et, au nord, Calais, le Ponthieu et le comté de Guînes. Le domaine capétien est ramené à ce qu'il était au début du règne de Philippe Auguste, 150 ans auparavant.

Le roi d'Angleterre promet de renoncer à la couronne de France. Le roi Jean II le Bon, encore emprisonné à Londres, renonce quant à lui à l'Aquitaine et, après avoir versé une lourde rançon, rejoint son pays.

Vers le redressement

Le Dauphin (ainsi appelle-t-on désormais l'héritier du trône), futur Charles V le Sage, régent du royaume de France en l'absence de son imbécile de père, doit lutter contre les Anglais mais aussi contre son beau-frère, le roi de Navarre, et contre ses frères qui ont bénéficié de vastes apanages de la part de leur père et désirent s'émanciper de la couronne tout en abaissant celle-ci.

Le duc de Bourgogne Philippe le Hardi et ses héritiers, Jean sans Peur, Philippe le Bon et Charles le Téméraire, constituent la plus grave menace pour la monarchie des Valois.

Après la mort de Jean II, en 1364, il faut toute l'habileté de Charles V le Sage et la hardiesse de Bertrand Du Guesclin, son futur connétable, pour peu à peu restaurer le royaume dans son intégrité.

Renonçant aux batailles frontales, ils placent de solides garnisons dans les villes et les bourgs et harcèlent autant que faire se peut les troupes anglaises. L'occupant s'épuise dans des sièges interminables et ne trouve nul endroit où se ravitailler. Ses «chevauchées» en territoire ennemi se soldent par des pertes très lourdes. En 1373, une armée commandée par le duc de Lancastre, frère du Prince Noir, traverse la France en ravageant les campagnes mais rentre à Bordeaux avec le tiers seulement de son effectif !

Pendant ce temps, les Français, usant de l'artillerie (une nouveauté !), procèdent méthodiquement au siège des places fortes tenues par les Anglais. Ceux-ci refluent lentement jusqu'à être chassé presque complètement de France.

En 1380, la disparition successive de Du Guesclin et Charles V laissent la France dans un état relativement serein et le conflit entre les monarchies anglaise et française pourrait s'arrêter là.

Mais c'est une autre histoire...

 


 

 

 

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