Actualités
Actualités
Ça s'est passé à Paris un 9 février

Écrit le jeudi 9 février 2017 05:37

jeudi, 09 février 2017 05:37

Ça s'est passé à Paris un 9 février

Le 9 février 1651

Le jour où le futur Roi soleil a failli ne jamais régner

 

Trois heures du matin, la nuit du 5 au 6 janvier 1649. Dans le Palais-Royal endormi, le maréchal de Villeroy gouverneur de Louis XIV, réveille le jeune roi et son frère cadet. sans un mot, il les habille à la lueur des torches. Les enfants, accompagnés de la reine-mère, gagnent une rue où les attend le cardinal Mazarin avec trois carrosses.

Prévenus au dernier instant, des fidèles rejoignent la famille royale. Quittant Paris en proie à la rébellion, tous se hâtent vers le château de saint-Germain. La date du départ, fixée en grand secret, a été judicieusement choisie: en cette nuit de janvier, le peuple de Paris ne prête pas attention au cortège, il est occupé à célébrer l'Epiphanie, la fête des rois.

Arrivés à destination, les fugitifs trouvent un château vide et délabré, sans feu ni meubles. seuls la reine, ses deux enfants, leur oncle Gaston d'Orléans et Mazarin peuvent dormir, grelottants, sur des lits de camp. Leurs compagnons couchent sur des bottes de paille, qui leur ont été vendues à prix d'or par des paysans. tout manque: vivres, linges, vêtements, domestiques... si bien que pour subvenir aux besoins, les diamants de la Couronne doivent être mis en gage les jours suivants.

Toute sa vie, Louis garda le souvenir de cette nuit terrifiante. Et il n'oublia jamais les responsables de cette humiliation: la noblesse de robe et les Grands du royaume qui avaient plongé le pays entier dans une interminable guerre civile baptisée la Fronde. Alors qu'au même moment la France était en guerre contre l'Espagne et la Maison d'Autriche.

En réalité, il n'y eut pas une mais quatre Frondes successives. La première opposa de 1648 à 1649 le pouvoir royal et les magistrats du Parlement de Paris qui voulaient imposer une monarchie modérée. C'est elle qui provoqua la fuite de la Cour à saint-Germain. huit mois plus tard, après un siège de Paris mené par Mazarin, le roi revenait triomphalement dans la capitale. La deuxième Fronde (1650-1651) fut menée par les Grands du royaume qui voulaient accroître leurs privilèges. Elle débuta avec l'emprisonnement du prince de Condé et de ses proches, qui provoqua la révolte de leurs alliés et des provinces qu'ils gouvernaient. Durant toute l'année 1650, la régente, le jeune Louis et Mazarin suivirent l'armée royale à travers la France, déplaçant la Cour au fil de ses victoires.

La troisième phase vit, en 1651, l'union des Frondes parlementaire et princière. La coalition força Mazarin à s'exiler pendant près d'un an en Allemagne. Le roi, âgé de 12 ans, vécut alors un second événement traumatisant.

Le 9 février 1651, le bruit courut qu'il allait encore s'enfuir de Paris. Le Palais-royal fut cerné, et toute la nuit, le peuple défila devant son lit pour s'assurer de sa présence. Pris, en quelque sorte, en otage, Louis fut contraint de signer la libération de Condé et de ses proches. Le 7 septembre suivant, il était proclamé majeur, devenant ainsi pleinement souverain, et l'ensemble des nobles lui faisait acte de soumission. sauf Condé, qui déclencha la quatrième Fronde (1651-1652). Une guerre qui ravagea de nouveau les provinces et s'acheva dans Paris. Défait, Condé rallia, suprême trahison, les troupes espagnoles, tandis que Louis XIV revenait à nouveau dans la capitale, le 21 octobre 1652, accueilli par une foule en liesse et bientôt rejoint par Mazarin.

Ces années de danger forgèrent le caractère du jeune roi. Elles parachevèrent son éducation et, pour reprendre les mots de l'historien François Bluche, elles «firent de l'enfant un adulte, d'un petit prince le grand roi». Louis sortit des épreuves mûri, endurci. il avait mesuré la perfidie des Grands et la versatilité du peuple. Jusqu'à sa prise totale du pouvoir après la mort de Mazarin, en 1661, il allait réfléchir à une organisation politique visant à contrôler les Grands du royaume. Une solution s'imposa: structurer la Cour, la mettre sous haute surveillance, et mieux encore, la fixer dans un lieu permanent. En 1682, il parvint à ses fins en l'installant à Versailles. Les nobles étaient dès lors sous bonne garde. Les cauchemars de son enfance étaient exorcisés...

Connectez-vous pour commenter